Lettre à... ma mèreChère Maman,
Comment ne pas commencer par toi cette série de lettres ?
Tu es celle qui le mérite le plus, sans aucun doute, et pour des tas de raisons.
Et d’abord, pour m’avoir mis au monde, c’est sûr ! Je ne m’en souviens certes pas, mais pour toi ce fut d’abord une souffrance, j’imagine, surtout que c’était la guerre, et que rien n’était facile à cette époque.
Mais bon, tu avais papa et ma sœur aînée, et la vie devait te paraître belle, malgré tout. Tu donnais un fils à l’homme que tu aimais. Un « héritier » ! Et il était si fier, paraît-il…
« Paraît-il », car il n’a jamais pu me le dire, où alors j’étais si jeune qu’il a fallut que tu entretiennes sa mémoire auprès de nous, ses enfants. J’avais à peine trois ans et demi quand il nous a quittés.
Veuve à trente ans, avec quatre enfants en bas-âge : tu étais plainte de tous, évidemment, mais tu as courageusement relevé le défi, et tu nous as élevés seule… à par l’intermède de « l’Autre ».
« L’Autre »…
Je ne sais plus laquelle de mes sœurs, car j’en ai donc trois finalement, lui a donné ce surnom, mais entre nous il lui est resté : il ne méritait certes pas le nom de « papa », qu’il avait voulu remplacer auprès de nous, et son prénom, nous l’exécrions désormais.
Quand à toi, après avoir connu un premier mari si merveilleux, celui-ci te décilla assez vite, somme toute, puisqu’il ne fallut pas tout à fait six ans avant que tu arrives à… nous en débarrasser !
Oh, maman, comme tu as du souffrir de tout cela !
Comme ce dû être pénible de te rendre compte que cet homme n’avait en rien mérité ni ton amour, ni ta confiance…
Mais fermons cette parenthèse, car je sais que tu n’aimais pas en parler. Je veux respecter cela.
Suivi alors une longue période où chacun de nous, tes enfants, faisions nos armes, face à la vie, toujours avec toi comme seule référence, mais tu étais solide comme un roc sur lequel nous pouvions nous appuyer.
Pourtant, bien plus tard, quand nous fûmes tous « casés », en quelque sorte, tu retrouvas le bonheur conjugal auprès d’un homme (voir photo) dont la longue amitié, qui datait déjà du temps de papa, vous a fait rejoindre pour une fin de vie commune, et ce fut un bonheur de quinze belles années avant que la mort ne l’emporte à son tour.
Toi, après cela, tu m’apparus de plus en plus désarmée et fragile…
Commençait alors le temps où la vie inverse un peu les rôles, faisant des enfants les protecteurs de leurs parents.
Quand, après quelques années encore, ton cœur fit mine de lâcher et qu’une opération semblait devoir te remettre d’aplomb, un stupide virus eu raison de toi après une lutte courageuse d’un mois, nous laissant à jamais orphelins de toi, mes sœurs et moi, inconsolables, car la perte d’une mère telle que toi, on ne s’en remet jamais tout à fait, même si l’on apprend à vivre avec ton souvenir.
Ton souvenir…
C’est lui, sans doute, qui m’inspire cette lettre comme un chant d’amour filial à une mère toujours aimée, par-delà la mort et en attendant de te rejoindre « de l’autre côté » de ce fleuve inconnu.
Un jour, moi-aussi je le traverserai, et là, je te retrouverai dans l’Amour Infini, celui de notre Créateur.
A-Dieu donc, maman.
Je t’aime…